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La dégradation du déficit public de la France

Le déficit s’est finalement établi à 5,5 % du PIB en 2023, selon les données publiées par l’Insee. La dégradation est spectaculaire par rapport aux prévisions du gouvernement, qui visait encore -4,9 % il y a quelques semaines. La dette publique est aussi supérieure aux attentes, à 110,6 % du PIB.

Quelques notions à bien distinguer : déficit, budget et dette

Le déficit public se réfère spécifiquement à la différence entre les dépenses publiques et les recettes publiques, généralement sur une période donnée, comme une année fiscale. C’est un élément du budget de l’État, mais il est distinct du budget lui-même.

Le déficit budgétaire est le solde négatif du budget de l’État. Il y a déficit lorsque les dépenses excèdent les recettes. Dans le cas contraire, on parle d’un excédent. Un budget est en équilibre lorsque les recettes sont égales aux dépenses.

Le budget, quant à lui, est un plan financier détaillé qui énonce les prévisions de recettes et de dépenses du gouvernement pour une période donnée, souvent une année fiscale. Le budget comprend généralement des estimations des dépenses dans divers secteurs (comme la santé, l’éducation, la défense, etc.) ainsi que les sources de revenus du gouvernement (comme les impôts, les taxes, etc.).

Ainsi, le déficit public est une mesure spécifique qui peut être présente dans le budget de l’État, mais ce n’est pas la même chose que le budget lui-même.

Il est important de distinguer le déficit public et la dette publique.

À ne pas confondre avec la dette publique correspond à l’ensemble des engagements financiers pris sous forme d’emprunts par l’Etat, les collectivités publiques et les organismes qui en dépendent directement. 

La dette publique évolue constamment au rythme des remboursements d’emprunts effectués par l’Etat et les administrations publiques et des nouveaux emprunts qu’ils contractent pour financer leurs déficits.

Un déficit public se réfère à la situation où les dépenses du gouvernement d’un pays dépassent ses recettes (c’est-à-dire les impôts et autres revenus). Cela signifie que le gouvernement doit emprunter de l’argent pour couvrir la différence entre ses dépenses et ses recettes. Le gouvernement peut emprunter sur le marché de la dette, le marché obligataire. En ce début d’année la France a emprunté 8 milliards d’euros sous forme d’OAT (obligation assimilable du trésor) dont la maturité est de 30 ans et qui atteint un taux de rendement à l’émission de 3,42 %.   


Le déficit public est souvent exprimé en pourcentage du produit intérieur brut (PIB) d’un pays.

Le déficit public peut résulter de divers facteurs, tels que des dépenses excessives, des baisses de recettes fiscales, des politiques de stimulation économique ou des situations d’urgence telles qu’une crise économique, crise sanitaire ou encore des catastrophes naturelles.

Cependant, un déficit public soutenu et excessif peut entraîner une augmentation de la dette publique, ce qui peut avoir des conséquences économiques à long terme, telles que des charges d’intérêt plus élevées et des contraintes budgétaires pour les générations futures.

Cela faisait des semaines que le gouvernement redoutait l’officialisation de ce chiffre. Le déficit public a connu l’an dernier un dérapage inédit, bondissant à 5,5 % du PIB, selon les données publiées par l’Insee, soit un total de 154 milliards d’euros.

L’annonce devrait susciter de fortes tensions politiques. Ce dérapage était pas du tout attendu par Bercy. Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, avait fixé, en matière de finances publiques, un objectif qui n’était pourtant déjà pas très ambitieux, avec un solde public attendu à -4,9 % en 2023 après -4,8 % en 2022. L’objectif avait même été réaffirmé en décembre dernier.

Las ! Le ralentissement de l’activité économique a eu raison des espoirs du gouvernement, qui craignait depuis quelques semaines une dérive jusqu’à -5,6 %. L’Insee indique également que la dette publique a atteint 110,6 %, alors que la prévision officielle était de 109,7 %.


Les trois formes de recettes fiscales :

• Les impôts sur la consommation c’est-à-dire la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et la taxe intérieure de consommations sur les produits énergétiques (TICPE) appliquée depuis le 1er janvier 2012 et qui remplace la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP).

• Les prélèvements sur les revenus : l’impôt sur le revenu (IR), l’impôt sur les sociétés (IS) et pour les revenus des personnes qui exercent une profession commerciale, industrielle ou artisanale à leur compte, l’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

• Les impôts sur la propriété et le capital composés de la taxe foncière (prélevée par les collectivités territoriales), des impôts sur les plus-values (immobilières et mobilières), de l’impôt sur les fortunes immobilières (IFI) et des droits de mutation (enregistrement, donation, succession).

Selon les économistes, le déficit budgétaire peut jouer différents rôles.

Pour Keynes, il peut stimuler la croissance et l’emploi dans une économie en récession. En revanche, les libéraux insistent sur les effets néfastes de l’accroissement de la dette publique.

La participation de la France à la monnaie unique européenne lui impose le respect d’une discipline économique et budgétaire. Les termes en ont été fixés dans un premier temps par le traité de Maastricht en 1992 et le pacte de stabilité et de croissance, conclu à Amsterdam en 1997 et assoupli en 2005 à Bruxelles.

  • Le déficit public, à savoir le déficit cumulé des administrations publiques (État + collectivités territoriales + organismes de sécurité sociale), est jugé excessif à partir d’un seuil de 3% du produit intérieur brut, qui peut toutefois être dépassé dans certaines circonstances.
  • Le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), signé le 2 mars 2012 à Bruxelles, met en place des contraintes plus fortes, exigeant que le déficit public structurel n’excède pas 0,5% du PIB et prévoyant des sanctions plus systématiques contre les États ne respectant pas les règles du pacte de stabilité.

Pacte de stabilité et de croissance : Instrument de coordination des politiques budgétaires nationales des pays de la zone euro visant à éviter l’apparition de déficits budgétaires excessifs imposant aux États d’avoir à terme des budgets proches de l’équilibre ou excédentaires

Dette publique : Ensemble des dettes de l’État résultant des emprunts que ce dernier a émis ou garantis.

La France est le seul grand pays de la zone euro ou le déficit dérape gravement !

Un nouveau record historique pour la dette publique à 3101,2 milliards d’euros. Plus de 718,2 milliards d’euros depuis le début 2020……

Un point important est que la France a une faible croissance (environ 0,6 %), d’un taux de chômage en augmentation et de l’aggravation de la charge d’intérêts de la dette, qui se suit par la poursuite de l’augmentation des dépenses publique. Le déficit public va encore s’aggraver et se rapprocher des 6 % du PIB.

Le coût de la dette publique est actuellement de 50 milliards d’euros par an. Les prévisions prévoient une hausse de 25 milliards dans les deux prochaines années, ce qui entraînera des intérêts de remboursement à hauteur de 75 milliards d’euros….. La charge annuelle d’intérêts de la dette publique française sera de plus en plus importante dans les années à suivre dû notamment aux échéances de remboursements qui arrivent, des taux directeurs qui  resteront hauts et de la baisse de la note de la France qui ne pourra pas conserver son AA.


La menace des agences de notation !

« Nos objectifs n’ont pas été atteints, il faudra en tirer les conséquences », a commenté sur RTL Bruno Le Maire. Celui-ci a avancé « des recettes fiscales moins élevées que prévues » avec une perte évaluée à 21 milliards d’euros. « Ce que nous avons peut-être sous-estimé, c’est qu’avec une inflation qui se réduit plus vite que prévu, cela entraîne des rentrées moins importantes, sur la TVA par exemple », a expliqué le locataire de Bercy. La crise du marché immobilier a aussi fortement grevé le niveau des droits de mutation à titre onéreux encaissés (-4,8 milliards selon l’Insee, soit -22,2 %).

Droits de mutation à titre onéreux : taxes perçues principalement par les collectivités territoriales et l’État français lors de la transmission d’un bien immobilier d’une personne à une autre, en contrepartie d’une somme d’argent.

« Une prise de conscience collective »

Cette annonce intervient en tout cas au plus mauvais moment pour le gouvernement. Dans les deux mois qui viennent, les trois principales agences de notation doivent à nouveau émettre un avis sur la soutenabilité de la dette française, et une dégradation de la note serait mal venue pour la majorité à quelques mois des élections européennes . L’influence de la France en Europe risque également d’en souffrir.

Surtout, l’officialisation de cette dégradation des comptes publics devrait provoquer son lot de maux de tête dans les semaines à venir pour les deux locataires de Bercy, Bruno Le Maire et Thomas Cazenave, le ministre délégué aux Comptes publics. Ces derniers s’étaient engagés à ramener le déficit à 4,4 % du PIB fin 2024, et avaient même annoncé un plan d’économie de 10 milliards d’euros pour y parvenir . Mais l’équation budgétaire semble désormais impossible à résoudre pour cette année, au vu du dérapage des comptes 2023.

Emmanuel Macron a déjà préparé les esprits à une révision de tous les objectifs immédiats de finances publiques.  À l’issue du sommet européen , il avait affirmé vouloir « tenir notre ajustement budgétaire avec deux ancres : la baisse du ratio de dette publique en 2026, et faire repasser le déficit sous 3 % du PIB en 2027 ». Façon de dire que tout le chemin pour y parvenir pouvait encore être revu d’ici là.

Le gouvernement met la pression sur les collectivités locales.

La dégradation des finances publiques affaiblit la position de la France en Europe.

Dans ce tableau assombri, l’exécutif cherche néanmoins à entamer le redressement des comptes publics. Sur RTL, Bruno Le Maire a assuré que « la France était à la croisée des chemins » en appelant à « une prise de conscience collective ».

« Les économies ne peuvent pas venir seulement de l’Etat », a-t-il ajouté, visant les dépenses sociales et les collectivités locales. Le locataire de Bercy a annoncé qu’il allait écrire à tous les opérateurs de l’Etat pour « leur donner un mois pour faire des propositions d’économies sur leurs budgets ». Pas question en revanche de jouer sur le levier des impôts, Bruno Le Maire ouvrant seulement la porte à un durcissement de la taxation des producteurs d’électricité .


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